Georges Frêche vu d’en face
L’ancien député giscardien Willy Diméglio fut pendant près de quarante ans l’adversaire de Georges Frêche, disparu il y a trois ans. Dans un livre imposant, « L’Avocat du diable » le Montpelliérain reconstitue méthodiquement l’itinéraire politique de celui qu’il a combattu avec courtoisie, mais sans concession. “Un jour de 1989, à Paris, au restaurant du Palais-Bourbon, Georges Frêche présente Willy Diméglio à sa vieille maman qu’il aime inviter dans ce haut lieu de la République : « Willy est mon meilleur opposant. Il est courageux, travailleur et il a de bonnes idées ». L’été de ses 77 ans, une idée étrange, inédite dans la classe politique, est venue au « meilleur opposant » : revisiter de bout en bout l’itinéraire du « grand visionnaire », son adversaire de quarante ans. Objectif : « Remettre les choses en place dans un récit à ma façon, ni trop doux, ni trop brutal ». L’entreprise est titanesque. Diméglio dispose d’une grande caisse d’archives accumulées « depuis vingt à trente ans ». C’est insuffisant. Médusé A la médiathèque, il se plonge dans la lecture de tous les livres qui parlent de Frêche, des comptes rendus de conseil municipal, des collections de Sud, de Midi Libre, de La Gazette de Montpellier. Il plonge dans les travaux universitaires. Il interroge des témoins. De cette exploration, Diméglio revient plus effrayé et médusé qu’hier par ce personnage « intelligent, menteur, manœuvrier, travailleur, organisé, agissant comme s’il était le centre du monde ». L’œuvre a pour nom L’Avocat du diable. C’est un livre de près de 600 pages, bourré de documents. Diméglio ne compte pas en faire un best-seller. Il s’est contenté d’un tirage de 300 exemplaires qui seront en librairie début octobre. Ses lecteurs seront des happy few : ses proches, des journalistes, des curieux, des universitaires, qui, un jour, espère-t-il, prolongeront son labeur”. Lui est parvenu à ses fins : « Je suis entré dans le logiciel de Frêche ». Jacques Molénat [La Gazette de Montpellier n°319 Du 26 septembre au 2 octobre 2013] ►►REPERES L’Avocat du diable Au Vatican, le procès en canonisation d’un futur saint met aux prises le “postulateur de la cause”, qui montre que le bienheureux est digne d’être sanctifié, et le “promoteur de justice” – l’avocat du diable – chargé de prouver le contraire : “Georges Frêche étant en voie de canonisation, explique Diméglio, il ne me déplaît pas de jouer ce rôle : pointer la faiblesse de la défense, présenter les contre-arguments.” “L’Avocat du diable” par Willy Diméglio, 562 pages, 18 euros.
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